NANTERRE, 22 jan 2010 (AFP)

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L'avocat de la famille d'un sans-papiers malien, mort en 2005 après sa garde à vue à Courbevoie (Hauts-de-Seine), a dénoncé vendredi l'inaction de la juge d'instruction en charge de l'enquête, alors qu'un rapport médical a contredit la version policière en juillet 2009.

"Depuis, il ne s'est absolument rien passé", a affirmé à l'AFP Yassine Bouzrou, l'avocat de la famille d'Abou Bakari Tandia, décédé le 24 janvier 2005, à 38 ans, après être tombé dans le coma le 5 décembre 2004 au commissariat de Courbevoie, où il était en garde à vue. En août 2009, à la suite du versement au dossier d'un complément d'expertise de l'Institut médico-légal (IML) contredisant la version policière, le parquet de Nanterre avait demandé à la juge d'instruction Béatrice Deshayes d'entendre les experts et des policiers en poste lors du drame.

"La juge d'instruction n'a répondu ni à ma demande de mise en examen des policiers, ni aux demandes du parquet", dénonce l'avocat.
Interrogé par l'AFP, le parquet a confirmé qu'aucun acte n'est intervenu depuis août dernier.
"On a enfin des éléments objectifs et elle prend la décision délibérée de ne rien faire", dénonce l'avocat, qui "examine" la possibilité de demander la récusation de la magistrate ou de demander qu'un second magistrat instructeur soit saisi à ses côtés.

Selon la version policière, Abou Bakari Tandia, interpellé le 4 décembre pour séjour irrégulier, se serait volontairement cogné la tête contre la porte de sa cellule, provoquant lui-même son coma.
Mais dans leur rapport, les trois experts de l'IML ont constaté que "nulle part" dans les différents dossiers n'apparaît "une lésion traumatique crânienne ou crânio-faciale par choc direct contre un plan dur".
De plus, en raison de "l'exiguïté de la cellule", "la déclaration" d'un gardien de la paix "qui aurait assisté à la projection de la victime contre la paroi de la cellule de la garde à vue est peu compatible avec les constatations médicales et médico-légales", écrivaient-ils également. Dans un rapport précédent, les experts de l'IML, qui n'avaient pu accéder qu'à une partie du dossier médical, avaient évoqué un "choc de la tête contre un plan dur", dont l'origine ne pouvait "être déterminée".

Samedi, l'association Vérité et Justice pour Abou Bakari Tandia et Amnesty International distribueront entre 11H00 et 17H00 dans le centre de Courbevoie une pétition sous forme de lettre à la Garde des Sceaux.
A l'occasion du 5e anniversaire de la mort du Malien, le texte demande à Michèle Alliot-Marie "de veiller à ce que l'enquête en cours soit poursuivie sans délai".

AFP le 22/01/2010 à 15:06